Geoffroy Roux de Bézieux sur Europe 1 : "On doit être content et fier que les entreprises françaises se portent bien"
Invité d'Europe Soir le vendredi 11 février, Geoffroy Roux de Bézieux est revenu sur la situation économique et a précisé les attentes des chefs d'entreprise à deux mois du premier tour de l'élection présidentielle.
Transition écologique
Revenant sur les annonces du Président de la République en termes de transition écologique, Geoffroy Roux de Bézieux s'est félicité du fait "qu’on trace des perspectives", Pour lui, il est évident "qu'il faut jouer sur tout le mix énergétique, l'éolien, le solaire, l'hydraulique, le nucléaire, probablement du gaz, il ne faut pas se tromper. (...) Il faut vraiment faire appel à toutes les ressources possibles". Quant au nucléaire, Geoffroy Roux de Bézieux considère qu' "on a complètement abandonné cette filière pour des raisons idéologiques et on se réveille un peu tard". Pour lui, il est clair "qu'on ne peut pas faire sans nucléaire. (...) On a arrêté Fessenheim au début du quinquennat, on a perdu 5 ans mais on a perdu aussi avant beaucoup, beaucoup de temps. Même si on achète de l'uranium à l'étranger, l’uranium, c'est 5 % du coût du nucléaire, donc il y a une forme d'indépendance avec le nucléaire, avec l'éolien aussi d'ailleurs, avec le solaire sauf qu’on est un pays où il y a moins de vent qu’au Danemark et moins de soleil qu'au Portugal pour faire simple".
Prix de l'énergie
Interrogé sur le moratoire de l'électricité du gouvernement aux dépens d’EDF, Geoffroy Roux de Bézieux considère que c'était "probablement inévitable à court terme en tout cas pour les industriels..Il y avait un certain nombre d'usines notamment aluminium, métallurgiques qui allaient s'arrêter (...) mais ce qui est absurde là-dedans, c'est que c’est « poche droite, poche gauche », à l'exception des 17 % d'actionnaires privés d'EDF, c'est vous et moi, enfin c'est les contribuables qui paieront. Donc il faut réformer de manière impérative le marché européen de l'électricité. On ne peut pas continuer comme ça. (...) On a décidé collectivement pour de très bonnes raisons de se priver du pétrole parce que c’est une énergie fossile qui émet du CO2. Le pétrole, c'est abondant, c'est facile à stocker, c'est facile à transporter et ce n’est pas cher. Donc le problème, c'est qu'on passe de cette source d'énergie à des sources d'énergie plus chères, intermittentes et qu'on ne stocke pas. Donc oui le prix de l'énergie va monter dans les années à venir, il faut aussi s’y habituer, il faut faire des efforts, redoubler de sobriété".
Inflation et salaires
Sur l'inflation, Geoffroy Roux de Bézieux pense qu'elle va durer et "qu'il est inévitable qu’il y ait une forme d'accompagnement parce que sinon, il y a dégradation du pouvoir d'achat. On voit d'ailleurs les augmentations de salaires qui tombent dans les branches. On pourrait être inquiet le jour où on rentre vraiment dans ce qu'on appelle la boucle inflation / salaire parce que si les salaires augmentent dans un certain nombre de métiers, où le salaire compte beaucoup dans la fabrication du prix de revient, forcément ça va faire monter les prix". Quant à la hausse du Smic préconisée par certains candidats, pour Geoffroy Roux de Bézieux, "le problème c'est que la hausse du Smic va générer forcément des hausses de prix très fortes. (...) Oui, il y a un effet immédiat de 20 % grosso modo d’augmentation de tous les salaires ; à court terme, on peut espérer qu'il y a un peu de relance de la demande et de la hausse de la consommation mais à moyen terme, cela crée du chômage. Donc je pense que c'est vraiment la mauvaise solution".
Déficit du commerce extérieur et compétitivité
Pour Geoffroy Roux de Bézieux, "c'est le thermomètre de notre compétitivité. (...) Malgré les efforts qu'il faut reconnaître de compétitivité qui ont été faits avec le CICE d'abord transformé en baisse de charges, avec les baisses d'impôts clairement, le pays n'est pas assez compétitif encore parce qu'on a pris 30 ans de retard notamment par rapport à nos voisins européens. Et puis probablement le déficit du commerce extérieur, ça n’est pas qu’un problème de compétitivité / coût, c'est aussi les filières où on n’est pas, on ne fait plus de machines outils en France. (...) Il faut beaucoup de temps pour recréer une filière, faire revenir des entreprises, donc la compétitivité de la France, on ne va pas là retrouver du jour au lendemain. (...) L’économie, c'est une machine à réaction lente, ça met du temps de récréer des tissus industriels. (...) C'est plus rapide de créer des entreprises dans le numérique, mais la réindustrialisation, est quand même en marche, on n'a jamais vu autant de projets industriels".
Fiscalité
Pour Geoffroy Roux de Bézieux, il est clair qu' "il faut aller plus loin en termes de baisse des impôts. Nous, ce qu'on demande simplement c'est d’être dans la moyenne européenne, on ne demande pas le dumping fiscal, on ne demande pas que la France soit un paradis fiscal, on dit simplement il faut qu'on soit dans la moyenne européenne". Quant aux impôts de production, "c'est là où il faut travailler parce que c'est cela qui nous handicape et qui handicape particulièrement l'industrie".
Crise en Ukraine
Sur la crise russo ukrainienne, Geoffroy Roux de Bézieux estime que "ça ne sert à rien de dramatiser les choses, il y a une tension indiscutablement, il faut négocier, la France a un rôle au-delà de son rôle spécifique de la présidence de l'Union européenne. (...) Je ne crois pas que pousser la Russie dans les bras de la Chine soit aussi une bonne idée. Nous du point de vue des entreprises, on essaye de parler à tout le monde".
Présidentielle
"On ne donnera certainement pas de consigne de vote, précise Geoffroy Roux de Bézieux. L'audition des candidats par le Medef a pour objet de comprendre ce que les candidats attendent des entrepreneurs et ce qu'ils pensent des entreprises". Pour lui, "un candidat qui serait contre les entreprises, aurait beaucoup de mal à se faire élire ! (...) On doit être content et fier que les entreprises françaises se portent bien et les 137 milliards de bénéfices estimés du CAC 40, il faut juste les ramener à d'autres chiffres. (...) La capitalisation d'Apple, la valeur d'Apple, c'est plus que toutes les entreprises du CAC 40 ! Donc le risque pour nous c'est qu'au final, il n' y ait plus de CAC 40, il n’y ait plus d'entreprises françaises puissantes et internationales et qu'on soit, une colonie en quelque sorte d'entreprises chinoises ou américaines. On est dans une guerre économique, il ne faut pas se tromper. (...) Je pense que globalement les Français, ont compris que la politique qui est menée depuis 2013, ce qu'on appelle la politique de l'offre, c'est-à-dire l'idée que c'est en mettant les entreprises en condition de compétitivité qu'elles vont créer des emplois, qu'elles vont investir, est la bonne politique. Et ce qu'on espère, c'est que les candidats et notamment celui qui sera élu, sera continuateur avec des nuances de cette politique".